Outlast est un jeu marquant à plus d’un égard. Sorti sur PC et PlayStation 4 en 2013, ce survival horror a connu un succès bien mérité.
Victoire qui perdure dans le temps avec une préquelle en 2014 et la sortie du deuxième opus en 2017. En 2024, Outlast franchit un nouveau cap avec Outlast Trials qui offre une expérience multijoueurs sur PC, PS4, PS5 et Xbox One.
Ce dernier épisode a déjà atteint 600 000 ventes qui viennent s’ajouter aux 15 millions précédentes. Un record pour le genre. Pourtant, la série des Outlast n’a rien inventé. Elle a même réaffirmé les codes du jeu de survie.
Comment Red Barrels, un studio indépendant de dix personnes, a-t’il réussi le pari de faire flipper des millions de joueurs avec le premier épisode ? Quelques éléments de réponse sont peut-être dans cette interview (réalisée en 2013) de Philippe Morin, président de Red Barrels.
Aurélie Knosp : Dans une interview, vous expliquez que vous vous êtes inspirés de propos scientifiques pour créer l’histoire d’Outlast. Si oui, dans quelles mesures ?
Philippe Morin : Nous avons travaillé avec des consultants scientifiques (Thwacke). Ils nous ont donné des profiles pour nous patients, des dossiers médicaux, ainsi que du feedback concernant les expérimentations qui se déroulent à l’asile.
Vous inspirez-vous de faits réels pour le scénario ?
Plusieurs éléments historiques nous ont influencés. L’opération Paperclip, le projet MKUltra, ainsi que les nombreux documents décrivant les expérimentations faites sur les prisonniers et les patients par le passé.
Pour les décors, avez-vous fait des recherches sur les asiles abandonnés ? Si oui lesquels? Vous êtes-vous rendus sur place ?
Nous n’avons pas visité d’asile, mais voici la liste de ce que nous avons utilisé comme références :
– H.H. Richardson Complex (pour la silhouette et la façade) :
– Denbigh Asylum (inspiration pour l’intérieur) :
– Harlem Valley Psychiatric Center (Inspiration pour la morgue) :
– Hellingly Hospital (inspiration pour la salle de récréation) :
– Concord State Hospital (pour l’extérieur)
– West Park Asylum Epsom Surrey
– Bolivar State Hospital :
– The work of Christopher Payne
Crédit des photos ci-dessus : Rob Dobi; Andrew Newson, project M4yh3m, Kent Leland
Avec toutes vos inspirations vidéoludiques (vous citez Amnesia, Condemned et Half Life), comment travaillez-vous pour créer et garder un univers original et cohérent ?
Nous avons effectivement plusieurs sources d’inspiration, mais nous avons également une vision précise de ce que nous souhaitons créer. Donc, nous prenons les éléments qui nourrissent notre vision, plutôt que de moduler notre vision en fonction de nos influences. Ensuite, il s’agit d’une combinaison de goûts et de préférences, tout en espérant que la sauce prenne et que les joueurs apprécient.
Dans le domaine du cinéma/ audio visuel, vous citez le clip « Rubber Johnny » pour la vision nocturne, avez-vous d’autres références visuelles ?
REC, The Shinning et Shutter Island furent des sources d’inspiration pour différentes raisons. REC pour la vision nocturne et la vue subjective. The Shinning pour le sentiment d’isolement. Shutter Island pour le style vieillot puisque l’historique de l’asile remonte au début du 20ème siècle.
Pour le character design, vous inspirez-vous de peintres (par exemple Bacon ou Bosch) ?
Vers la fin du jeu, on voit un tableau dans le bureau… La chute de Abel et Caïn ?
Considérant la nature des expérimentations faites à l’asile, nous n’avions pas vraiment de références. Nous avons donc simplement utilisé notre imagination.
Quels instruments et quels bruitages utilisez-vous pour le design sonore ?
Plusieurs expérimentations ont été faites. Notre compositeur a d’ailleurs fait une petit documentaire sur le sujet :
Comment abordez-vous les mécaniques de la peur ? Comment prévoyez-vous nos réactions ?
Ce fut un long apprentissage pour nous. Beaucoup de choses ont été essayées pendant les premiers mois de production. Nous avons fait plusieurs erreurs, mais de nombreux playtests nous ont permis de rectifier le tir. Contrairement à plusieurs autres types de jeux, il est très difficile d’évaluer si un jeu d’horreur fonctionne, puisque nous connaissons tout de notre jeu et qu’aucune surprise ne persiste. Il faut donc faire plusieurs playtests et se fier à notre instinct.
Pourquoi un tel contraste (froid, labo, armes) à la fin du jeu ?
Nous voulions un nouveau type d’environnement et éviter la répétitivité. Nous nous sommes inspirés d’un labo qui existe vraiment, soit le SNOLAB. Le blanc du labo nous permettait de créer un effet intéressant avec le mode de vision nocturne.
Avez-vous prévu un DLC, une suite pour développer le background de Mount Massive ?
L’idée de faire un DLC a toujours fait partie de nos plans. Le titre est Outlast: Whistleblower. Le DLC est à la fois un prologue et un épilogue. Le protagoniste est l’employé de Murkoff qui envoya un courriel à Miles et l’incita à enquêter l’asile.
La version PS4 est-elle exactement la même que sur PC ? Êtes-vous tenus de travailler avec Sony ?
La seule différence est un niveau de difficulté supplémentaire dans la version PS4. Il s’agit du mode “ Insane ” dans lequel le joueur n’a pas de checkpoints et ne peut sauvegarder. Pour le reste, c’est le même jeu. Aucun lien ne nous lie à Sony, mais nous avons une excellente relation.
Quels sont les avantages et inconvénients en étant indépendants ?
Il n’y a qu’un seul désavantage, soit l’impossibilité de recourir à une armée de ressources en fin de projet. Pour le reste, on ne reviendrait jamais en arrière. On apprécie trop notre indépendance et le plaisir de travailler au sein d’une petite équipe.
Enfin, un conseil pour ceux qui veulent se lancer ?
Prenez des risques et faites des erreurs. un jeu ne se fait pas, mais se refait. C’est un processus d’itération.
Petit bonus avec un journal de développement sur Outlast Trials :
N’hésitez pas à suivre la chaîne YouTube Red Barrels pour plus de contenu.
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